Les plantes médicinales ont ce talent fou de traverser les frontières et les générations. Mais peu d’entre elles suscitent autant de curiosité que la Serpina, aussi connue sous le nom de Rauwolfia serpentina. Imaginez une petite plante verte originaire d’Asie du Sud, aussi discrète qu’un herbe dans le jardin, qui a pourtant révolutionné la façon dont on traite certaines maladies du cœur, l’anxiété, et même l’hypertension. Et si je vous disais qu’elle a même été citée dans les textes traditionnels indiens il y a plus de 2000 ans ? Depuis, sa réputation n’a cessé de grandir, portée par des études scientifiques et des témoignages venus du monde entier.
L’origine fascinante de la Serpina
Impossible de parler de la Serpina sans évoquer sa terre natale : l’Inde. Là-bas, on l’appelle parfois Sarpagandha, ce qui signifie littéralement « racine du serpent ». Sa tige serpente à travers les petits champs humides, portée par une histoire presque aussi ancienne que l’Ayurveda. Ce n’est pas un hasard : la Serpina a été utilisée dans la pharmacopée indienne, tibétaine et chinoise depuis la nuit des temps. Les herboristes locaux l’utilisaient déjà pour calmer les fièvres, soulager les morsures de serpent, et traiter toutes sortes de troubles nerveux.
Le vrai déclic, côté Occidental, a lieu dans les années 1950. Deux chercheurs indiens, R.N. Chopra et S.K. Bose, isolent pour la première fois un alcaloïde nommé « réserpine » à partir des racines de la plante. À l’époque, on cherche désespérément des solutions contre l’hypertension artérielle, une maladie qui tue silencieusement des millions de personnes chaque année. Bingo : la Serpina devient la première plante à donner naissance à un médicament antihypertenseur largement diffusé à l’échelle mondiale.
On retrouve d’ailleurs les premières grandes exportations de racines de Rauwolfia serpentina dans les registres douaniers britanniques à la fin des années 1950. Rien qu’en 1955, plus de 300 tonnes de racines sont expédiés vers l’Europe et les États-Unis. Pas mal pour une plante inconnue 10 ans auparavant !
Les usages médicinaux de la Serpina aujourd’hui
Ce qui rend la Serpina vraiment unique, ce sont ses usages multiples. Mais attention, malgré sa popularité, elle demande des précautions d’utilisation. Serpina agit surtout comme antihypertenseur, sédatif et tranquillisant naturel grâce à sa fameuse réserpine. Cette petite molécule n’a pas seulement conquis les cardiologues ; elle a aussi ouvert la voie aux premiers traitements contre les troubles psychiatriques, en particulier la schizophrénie.
Voici quelques usages traditionnels et actuels de la Serpina :
- Hypertension artérielle : elle aide à faire baisser la tension, souvent utilisée en complément des autres traitements modernes.
- Anxiété et troubles du sommeil : grâce à ses propriétés relaxantes sur le système nerveux.
- Migraines : certains praticiens ayurvédiques la conseillent pour soulager les céphalées tenaces.
- Symptômes de sevrage : utilisée traditionnellement pour calmer les tremblements et la nervosité pendant la désintoxication.
On la retrouve le plus souvent sous forme d’extraits secs, de comprimés ou de teintures. En Inde, la marque Himalaya propose depuis les années 1930 un médicament appelé simplement « Serpina® », plébiscité par des millions de patients souffrant d’hypertension. En France, l’utilisation reste marginale et réservée aux praticiens de médecines douces, même si de rares pharmacies proposent encore des extraits normalisés sur prescription.
Côté modernité, les chercheurs ne s’arrêtent pas là. Ils s’intéressent maintenant aux effets protecteurs de la Serpina contre certains troubles cognitifs. Certaines publications entre 2018 et 2023 indiquent de possibles effets sur la mémoire et la prévention du déclin neurologique, même si cela reste à confirmer sur le long terme.

Données scientifiques et composition de la Serpina
La force de la Serpina, c’est une composition qui ne ressemble à aucune autre plante. Au cœur de ses racines, on trouve plus de 50 alcaloïdes différents, mais la réserpine est la star du groupe. Cette molécule agit principalement sur le système nerveux central, en favorisant la baisse du tonus sympathique, ce qui calme le rythme cardiaque et la pression artérielle.
Voici un petit tableau pour y voir plus clair :
Molécule principale | Pourcentage moyen dans la racine sèche | Effet principal |
---|---|---|
Réserpine | 0,1 à 0,4 % | Antihypertenseur, sédatif |
Ajmaline | 0,1 à 0,2 % | Antiarythmique, calmant |
Serpentine | 0,05 % | Relaxant musculaire |
Petite précision : ces chiffres varient selon la qualité du sol où la Serpina pousse et selon la méthode de récolte. Voilà pourquoi les produits préparés en laboratoire sont toujours standardisés, histoire d’éviter les surdosages.
La recherche montre aussi que la réserpine agit sur la transmission de la dopamine et de la noradrénaline, deux messagers chimiques du cerveau impliqués dans la stabilité de l’humeur et du sommeil. Pas étonnant qu’elle ait été étudiée dès les années 1960 dans les traitements de certains troubles psychiatriques !
Le revers de la médaille ? Si la Serpina est utilisée à forte dose ou sur le long terme, elle peut entraîner une chute de l’humeur (voire une dépression) ou accentuer la fatigue. C’est la raison pour laquelle son usage est de plus en plus encadré dans le monde médical occidental.
Conseils, précautions et astuces pratique avec la Serpina
Avant de tester la Serpina, il est essentiel de consulter un professionnel de santé, surtout si vous prenez déjà des médicaments pour le cœur ou des antidépresseurs. Cette plante peut interagir avec de nombreux traitements modernes, notamment les diurétiques, les bêtabloquants ou les antidépresseurs tricycliques.
Quelques règles simples pour rester du bon côté des bienfaits :
- Ne jamais dépasser la dose conseillée : Les extraits titrés sont très puissants, 0,1 mg de réserpine par jour suffit largement pour la majorité des traitements naturels.
- Espacer les cures : On conseille rarement de dépasser 6 à 8 semaines consécutives d’utilisation sans pause d’au moins 2 à 3 semaines.
- Signaler immédiatement tout effet secondaire : fatigue intense, troubles de l’humeur, ou problèmes digestifs doivent absolument pousser à arrêter la prise.
- Privilégier les produits labellisés ou contrôlés : Le marché est saturé par les contrefaçons, surtout sur les sites d’e-commerce asiatiques.
Un autre point souvent ignoré : la Serpina ne se combine pas avec tous les types de plantes ou de suppléments. Elle est à proscrire chez les femmes enceintes ou allaitantes, et déconseillée aux personnes souffrant d’ulcère gastroduodénal ou d’insuffisance cardiaque avancée.
Pour bien la conserver, rien de mieux qu’un endroit sec et à l’abri de la lumière. Les anciens disent qu’on reconnaît une racine de qualité à son odeur légèrement poivrée et à sa teinte brun-vert intense. Un petit conseil de grand-mère : pour la préparer en décoction, ne dépassez jamais 3 à 5 g de racines séchées pour 500 ml d’eau, et ne consommez pas plus d’une tasse par jour sans surveillance médicale.
En résumé, la Serpina fascine par son histoire et ses propriétés, mais mérite respect et prudence. Utilisée à bon escient, elle rappelle que la nature offre parfois les meilleurs alliés pour la santé… à condition de savoir les apprivoiser avec intelligence et modération.
Ecrit par Gaëlle Veyrat
Voir tous les articles par: Gaëlle Veyrat