Pourquoi gérer les dates de péremption des médicaments est essentiel
Vous avez peut-être déjà pris un médicament après sa date de péremption parce qu’il avait l’air normal. Vous n’êtes pas seul. Près de 70 % des adultes aux États-Unis avouent avoir fait cela au moins une fois. Mais ce n’est pas une pratique sans risque. Les médicaments périmés peuvent perdre de leur efficacité - ou, dans certains cas, se dégrader en composés dangereux. L’Agence américaine de la santé (FDA) estime que la mauvaise gestion des médicaments contribue à plus de 125 000 décès par an aux États-Unis. Ce n’est pas une question de peur, mais de sécurité.
Les médicaments comme l’insuline, la nitroglycérine ou les antibiotiques liquides se dégradent rapidement après leur date de péremption. Un patient ayant utilisé une stylo à insuline six mois après sa date de péremption a vu ses taux de sucre dans le sang devenir incontrôlables. Un inhalateur d’asthme périmé peut ne plus délivrer la bonne dose, mettant la vie en danger pendant une crise. Et pourtant, des études montrent que 90 % des comprimés conservent leur efficacité bien après leur date de péremption - si stockés dans des conditions idéales. Le problème ? Rarement, à la maison, les conditions sont idéales.
Les règles de base : ce que dit la loi et les experts
En France comme aux États-Unis, les dates de péremption sont fixées par les fabricants après des tests de stabilité. Elles garantissent que le médicament conserve sa puissance, sa pureté et sa sécurité jusqu’à cette date, sous les conditions de stockage indiquées. La FDA exige que ces dates soient clairement imprimées sur les emballages. Pour les médicaments sur ordonnance, la date de péremption est souvent de 1 à 3 ans après la fabrication. Mais attention : une ordonnance peut être valable seulement 6 mois pour certains médicaments contrôlés, même si le médicament lui-même n’est pas périmé.
Les professionnels de santé suivent des normes strictes. En milieu hospitalier, les préparations stériles doivent avoir une date limite d’utilisation (BUD) de 180 jours maximum à température ambiante. Pour les médicaments à risque - comme l’insuline - les recommandations de l’Institut pour la pratique médicamenteuse sûre (ISMP) préconisent des contrôles hebdomadaires. Pour les particuliers, la règle est simple : si vous ne savez pas, vérifiez. Et si vous doutez, jetez.
Comment créer votre propre calendrier de vérification
Créer un calendrier de vérification ne demande pas de logiciel compliqué. Voici comment le faire en 5 étapes simples.
- Recensez tous vos médicaments - prescrits, en vente libre, vitamines, suppléments. Sortez-les tous de leurs tiroirs, armoires, sacs. Mettez-les sur une table propre.
- Identifiez les dates de péremption - elles sont toujours imprimées sur l’emballage, souvent sous « Exp. » ou « À utiliser avant ». Notez-les sur un papier ou dans une appli. Attention : ne confondez pas la date de fabrication avec la date de péremption.
- Classez par risque - mettez de côté les médicaments critiques : insuline, épinephrine, nitroglycérine, antibiotiques liquides, contraceptifs. Ceux-là doivent être vérifiés chaque mois. Les autres, comme les analgésiques ou les antihistaminiques, peuvent être contrôlés tous les 3 mois.
- Fixez un jour de vérification - choisissez un jour fixe chaque mois, par exemple le premier lundi. Mettez-le en rappel sur votre téléphone. Si vous avez des médicaments en réfrigérateur, vérifiez-les chaque mois. Pour les autres, un contrôle trimestriel suffit.
- Documentez - tenez une petite liste : nom du médicament, dose, date de péremption, où il est stocké. Cela vous évitera de jeter un médicament encore bon, ou de le garder trop longtemps.
Les outils pour vous aider
Vous n’êtes pas obligé de tout faire à la main. Plusieurs outils rendent la tâche plus facile.
- Applis gratuites : Medisafe ou MyTherapy permettent de scanner les codes-barres des médicaments et d’envoyer des rappels automatiques avant la péremption. Elles fonctionnent même hors ligne.
- Organiseurs de pilules : certains modèles, comme ceux de Hero Health, ont des alarmes intégrées et enregistrent automatiquement les prises. Ils coûtent environ 500 €, mais peuvent valoir le prix si vous prenez plusieurs médicaments par jour.
- Feuille imprimée : téléchargez le modèle gratuit du National Council on Aging. Imprimez-le, collez-le sur votre frigo, et cochez les dates au fur et à mesure. Simple, fiable, sans batterie.
Les systèmes numériques réduisent les erreurs de 22 % par rapport aux méthodes manuelles. Mais même une feuille de papier, bien utilisée, est plus efficace que rien.
Comment bien stocker vos médicaments
La chaleur, l’humidité et la lumière accélèrent la dégradation. Le garde-manger ou la salle de bain sont les pires endroits. La salle de bain est particulièrement mauvaise : la vapeur d’eau des douches fait dégrader les comprimés plus vite.
Stockez vos médicaments dans un endroit frais, sec, à l’abri de la lumière - comme un tiroir de la chambre ou une armoire dans le couloir. Les médicaments qui doivent être réfrigérés (insuline, certains antibiotiques) doivent rester entre 2 et 8 °C. Ne les mettez pas dans le compartiment de la porte du frigo : les variations de température sont trop grandes.
Gardez toujours les médicaments dans leur emballage d’origine. Les étiquettes contiennent des informations cruciales : numéro de lot, date de péremption, instructions de stockage. Si vous les transférez dans un pot en verre, notez manuellement ces informations sur une étiquette.
Que faire des médicaments périmés ?
Ne les jetez pas à la poubelle. Ne les jetez pas non plus dans les toilettes. Ces pratiques polluent l’environnement et peuvent être dangereuses pour les enfants ou les animaux.
En France, les pharmacies participent au programme de reprise des médicaments périmés. Apportez-les à votre pharmacie - elles les collectent gratuitement. Plus de 8 000 points de collecte sont disponibles dans tout le pays. Certains centres de santé proposent aussi des journées de collecte. Vérifiez sur le site de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
Si vous ne trouvez pas de point de collecte, mettez les comprimés dans un sac scellé avec du café moulu ou du sel pour les rendre inutilisables, puis jetez-les dans la poubelle ordinaire. Pour les liquides, mélangez-les avec du terreau ou du sable. Ne laissez jamais les médicaments accessibles.
Les pièges à éviter
- Ne pas vérifier les médicaments « de secours » : les auto-injecteurs d’épinéphrine, les inhalateurs d’asthme ou les comprimés d’aspirine en cas de crise cardiaque doivent être vérifiés chaque mois. Ils ne se « réactivent » pas après péremption.
- Confondre date de péremption et date d’ouverture : une fois ouvert, un flacon de gouttes oculaires doit être jeté après 28 jours, même si la date de péremption est dans 2 ans.
- Utiliser un médicament périmé « parce qu’il n’a pas l’air périmé » : la couleur, l’odeur ou la texture ne sont pas des indicateurs fiables. Une pilule peut être chimiquement dégradée sans changer d’apparence.
- Ne pas consulter un pharmacien : si vous avez un doute, demandez. Un pharmacien peut vous dire si un médicament est encore sûr à utiliser, surtout pour les traitements chroniques.
Le bilan : sécurité, économie, responsabilité
Créer un calendrier de vérification des dates de péremption ne prend que 15 minutes par mois. Mais les bénéfices sont énormes : moins de risques pour votre santé, moins de gaspillage, moins de stress. Les Américains jettent chaque année 7,2 milliards de dollars de médicaments encore bons - simplement parce qu’ils ne savent pas quoi faire. Vous, vous savez maintenant.
En suivant ce système, vous protégez non seulement votre propre santé, mais aussi celle de votre famille. Et vous contribuez à réduire la pollution médicamenteuse. Ce n’est pas une tâche de médecin ou de pharmacien. C’est une responsabilité de chaque usager de médicaments.
Les médicaments périmés sont-ils dangereux ?
Certains oui, d’autres non. La plupart des comprimés perdent simplement de leur efficacité après la date de péremption, ce qui peut rendre un traitement inefficace. Mais certains médicaments, comme l’insuline, la nitroglycérine ou les antibiotiques liquides, peuvent se dégrader en substances toxiques ou perdre leur puissance rapidement, ce qui peut être dangereux. Même si un comprimé semble normal, il est préférable de ne pas le prendre après sa date de péremption.
Puis-je utiliser un médicament 1 mois après sa date de péremption ?
Pour les médicaments courants comme les analgésiques ou les antihistaminiques, une période de 1 à 2 mois après la date de péremption peut être acceptable si le médicament a été bien conservé et n’a pas changé d’apparence. Mais pour les médicaments critiques - insuline, épinephrine, contraceptifs, antibiotiques - il ne faut jamais les utiliser après la date indiquée. Quand vous avez un doute, consultez un pharmacien.
Comment savoir si un médicament est encore bon ?
Regardez l’emballage : la date de péremption est la seule référence officielle. Ensuite, vérifiez l’apparence : un comprimé cassé, coloré, ou qui sent mauvais doit être jeté. Une solution trouble, avec des particules ou une odeur forte, est à jeter. Mais ne vous fiez pas uniquement à l’apparence : un médicament peut être chimiquement dégradé sans changer de couleur ou d’odeur.
Dois-je vérifier les vitamines et les suppléments ?
Oui. Même si les vitamines ne sont pas toxiques après péremption, elles perdent de leur efficacité. Une vitamine D périmée ne vous protégera plus efficacement contre un déficit. Les suppléments contenant des huiles (oméga-3, vitamine E) peuvent rancir et perdre leur valeur nutritionnelle. Vérifiez-les tous les 6 mois.
Où puis-je jeter mes médicaments périmés en toute sécurité ?
Toutes les pharmacies en France participent au programme de reprise des médicaments périmés. Apportez-les simplement à votre pharmacie. Elles les collectent gratuitement et les éliminent selon les normes environnementales. Vous pouvez aussi consulter le site de l’ANSM pour trouver un point de collecte près de chez vous. Ne les jetez jamais à la poubelle ou dans les toilettes.
Ecrit par Gaëlle Veyrat
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