Voyager avec des anticoagulants : maintenir des niveaux sûrs à l'étranger

Voyager avec des anticoagulants : maintenir des niveaux sûrs à l'étranger

Vous prenez des anticoagulants et vous voulez voyager ? Voici ce qu’il faut savoir pour rester en sécurité.

Partir en voyage, c’est excitant. Mais si vous prenez des anticoagulants, une simple erreur peut avoir des conséquences graves. Une heure de vol retardée, un repas différent, une boisson alcoolisée en plus… tout ça peut déséquilibrer votre traitement. Et vous n’êtes pas dans votre pays, où tout le monde connaît votre dossier médical. La bonne nouvelle ? Avec les bons réflexes, voyager avec des anticoagulants est tout à fait possible. La mauvaise ? Beaucoup de gens ne savent pas comment s’y prendre.

En 2025, les anticoagulants modernes, appelés DOAC (anticoagulants oraux directs), sont devenus la norme pour la plupart des patients. Contrairement au warfarin, ils ne nécessitent pas de prises de sang régulières. Ils agissent rapidement, ont moins d’interactions avec la nourriture, et sont beaucoup plus prévisibles. Si vous êtes encore sous warfarin, ce n’est pas une catastrophe - mais vous devez être encore plus vigilant.

Warfarin ou DOAC : quel traitement choisir pour voyager ?

Le warfarin, le traitement traditionnel, exige un suivi strict. Vous devez faire des analyses d’INR tous les mois - parfois plus souvent. L’INR mesure la capacité de votre sang à coaguler. Le but ? Garder ce chiffre entre 2,0 et 3,0. Si c’est trop bas, vous risquez un caillot. Si c’est trop haut, vous saignez facilement. Et pendant un voyage ? Impossible de prévoir où vous trouverez un laboratoire qui fait les tests, ou qui accepte votre carnet jaune.

Les DOAC, eux, n’ont pas besoin de ce suivi. Dabigatran, apixaban, rivaroxaban, edoxaban : ces molécules agissent de façon constante, sans ajustement quotidien. Vous les prenez à heure fixe, et c’est tout. Pas de changement de dose en fonction de ce que vous avez mangé. Pas de carnet jaune à traîner partout. C’est pourquoi les médecins recommandent désormais les DOAC pour les voyageurs - surtout si vous partez plus de quelques jours.

Mais attention : les DOAC ne sont pas pour tout le monde. Si vous avez une valve cardiaque mécanique, une insuffisance rénale sévère, ou si vous avez eu un caillot récemment, votre médecin pourrait vous garder sous warfarin. Dans ce cas, vous devez préparer votre voyage comme un missionnaire en terrain hostile.

Les 3 règles d’or pour ne pas oublier vos comprimés

La première cause d’urgence médicale pour les voyageurs sous anticoagulants ? Oublier une dose. Pas une, pas deux. Une seule dose ratée peut augmenter le risque de caillot. Et si vous traversez trois fuseaux horaires ? Votre horaire de prise de médicament est décalé. Votre corps ne le sait pas. Il attend son traitement à l’heure habituelle.

Voici ce que vous devez faire :

  1. Activez une alerte sur votre téléphone - pas une seule, mais deux. Une pour le matin, une pour le soir. Nommez-la « Anticoagulant » et mettez-la en répétition. Ne comptez pas sur votre mémoire.
  2. Utilisez un organisateur de comprimés - avec des cases pour chaque jour. Remplissez-le avant de partir. Si vous partez 10 jours, prenez 12 jours de traitement. Juste au cas où.
  3. Ne changez jamais l’heure de prise - même si vous êtes à Tokyo et que votre corps réclame le sommeil. Prenez votre comprimé à la même heure locale que d’habitude. Si vous prenez votre traitement à 18h en France, prenez-le à 18h à Tokyo. Votre corps s’adaptera. Votre sang, lui, ne fait pas de compromis.

Et si vous oubliez une dose ? Ne doublez jamais la suivante. Appelez un médecin local. Ou contactez votre médecin en France. Les pharmacies à l’étranger peuvent vous conseiller, mais ne les laissez pas décider à votre place.

Passager en avion faisant des exercices aux chevilles avec des chaussettes de compression et un menu interdit de épinards.

Comment gérer l’alimentation à l’étranger ?

Le warfarin est sensible à la vitamine K. Et la vitamine K, elle, est partout : épinards, brocoli, chou, huile de canola, foie. En France, vous mangez les mêmes légumes tous les jours. À Bali, vous mangez du riz, du poisson, du lait de coco. En Thaïlande, vous avez des salades de papaye verte. En Italie, vous goûtez à la sauce pesto. Chaque repas peut changer votre INR.

Si vous êtes sous warfarin, voici ce que vous devez faire :

  • Ne changez pas radicalement votre alimentation. Si vous mangez des épinards tous les jours en France, continuez à en manger - même si c’est un peu différent à l’étranger.
  • Évitez les régimes « detox » ou les jus verts. Ils contiennent trop de vitamine K.
  • Ne buvez pas d’alcool en excès. L’alcool affaiblit la coagulation et augmente le risque de saignement.
  • Ne buvez pas non plus trop de thé vert. Il peut interférer avec le warfarin.

Si vous êtes sous DOAC ? Vous pouvez manger ce que vous voulez. Pas de stress. Pas de calculs. C’est l’un des grands avantages.

Le vol long courrier : le moment le plus dangereux

Les vols de plus de 6 heures augmentent le risque de thrombose veineuse profonde (TVP). C’est un caillot qui se forme dans les jambes. Il peut se détacher et aller dans les poumons - une embolie pulmonaire, qui peut être mortelle. Les anticoagulants réduisent ce risque, mais ne l’éliminent pas.

Voici ce que vous devez faire pendant le vol :

  • Marchez au moins 10 minutes toutes les 2 à 3 heures. Même si vous êtes dans un avion bondé, allez aux toilettes, étirez-vous.
  • Faites des mouvements de cheville en siège : montez et descendez vos orteils, tournez vos pieds. C’est simple, mais ça fait circuler le sang.
  • Portez des bas de compression. Ce sont des chaussettes élastiques qui aident à éviter le gonflement des jambes. Elles ne remplacent pas les anticoagulants, mais elles les renforcent.
  • Boivez de l’eau. Beaucoup. Pas de soda, pas de café, pas d’alcool. La déshydratation épaissit le sang. Et votre sang est déjà trop fluide - il ne faut pas le rendre plus visqueux.

Si vous avez eu un caillot dans les 4 semaines précédant votre voyage, ne partez pas. Même si vous prenez des anticoagulants. Votre corps n’est pas encore stabilisé. Attendez. C’est une règle que les médecins répètent, mais que beaucoup ignorent.

Voyageur en urgence médicale à l'étranger tenant une liste médicale, entouré de comprimés flottants et d'éléments dangereux.

Que faire en cas d’urgence à l’étranger ?

Vous avez une chute, une plaie qui ne s’arrête pas de saigner, une douleur soudaine dans la jambe, une respiration sifflante ? C’est une urgence. Mais vous êtes à l’autre bout du monde. Que faire ?

  • Carry your medication list. Écrivez sur un papier ou dans votre téléphone : votre nom, votre traitement (ex : « Apixaban 5 mg deux fois par jour »), votre dose, la date de votre dernière prise, et votre médecin en France.
  • Si vous êtes sous warfarin, avez-vous votre carnet jaune ? S’il est dans votre valise ? Il faut qu’il soit dans votre sac à main. Tous les médecins à l’étranger le reconnaissent. C’est une référence internationale.
  • Ne cherchez pas un « spécialiste » en anticoagulation. Tout médecin généraliste peut gérer une urgence. Il lui suffit de connaître votre traitement. Montrez-lui votre liste.
  • Si vous avez un DOAC, mentionnez le nom exact. « Rivaroxaban » n’est pas « Xarelto » pour un médecin chinois. Utilisez le nom générique. C’est plus universel.

Les centres médicaux internationaux, dans les grandes villes, ont des protocoles pour les patients sous anticoagulants. Ils savent comment réagir. Ce qui compte, c’est que vous leur donniez les bons éléments.

Les pièges à éviter absolument

Voici ce que beaucoup de voyageurs font - et qui peut leur coûter cher :

  • Prendre de l’aspirin en plus - pensez que ça « renforce » votre traitement. Non. C’est dangereux. Vous augmentez le risque de saignement sans réduire le risque de caillot.
  • Prendre des compléments alimentaires - ginkgo, gingembre, curcuma, vitamine E… Tous peuvent augmenter le risque de saignement. Même si c’est « naturel ».
  • Se baigner dans des eaux chaudes ou faire de la plongée - surtout si vous êtes sous warfarin. Une pression soudaine (comme en plongée) peut provoquer un saignement dans les oreilles ou la moelle épinière. C’est rare, mais mortel.
  • Ne pas consulter avant de partir - vous ne vous êtes pas fait vérifier votre INR ? Vous n’avez pas demandé un certificat médical ? Vous partez les yeux fermés. Un simple rendez-vous avec votre médecin 2 semaines avant le départ peut éviter un désastre.

Que faire après votre retour ?

Vous êtes rentré. Vous avez bien pris vos comprimés. Vous n’avez eu aucun problème. Mais votre corps a été décalé. Votre routine est rompue. Votre sang n’a pas oublié.

Si vous êtes sous warfarin : prenez rendez-vous pour une analyse d’INR dans les 5 jours suivant votre retour. Votre taux peut être décalé à cause des décalages horaires, du stress, ou des repas différents.

Si vous êtes sous DOAC : pas besoin de contrôle. Mais notez tout ce qui s’est passé pendant le voyage : avez-vous oublié une dose ? Avez-vous eu une chute ? Une infection ? Dites-le à votre médecin à votre prochaine visite. C’est important pour ajuster votre traitement à long terme.

Et surtout : ne vous sentez pas coupable si vous avez eu un moment de panique. Beaucoup de voyageurs sous anticoagulants ont eu peur. La clé, ce n’est pas d’être parfait. C’est d’être préparé.

Puis-je voyager avec des anticoagulants si j’ai eu un caillot récemment ?

Non, si vous avez eu un caillot dans les 4 semaines précédant votre voyage, il est fortement déconseillé de voyager, même si vous prenez des anticoagulants. Votre corps est encore en phase de stabilisation. Le risque de récidive est plus élevé pendant cette période. Attendez au moins un mois, puis consultez votre médecin pour évaluer votre risque avant de réserver un billet.

Les DOAC sont-ils vraiment plus sûrs que le warfarin pour les voyageurs ?

Oui, pour la majorité des patients. Les DOAC (comme l’apixaban ou le rivaroxaban) n’exigent pas de contrôle sanguin, ont moins d’interactions alimentaires, et agissent de façon plus prévisible. Le warfarin, lui, dépend fortement de l’alimentation et nécessite des prises de sang régulières - ce qui est difficile à gérer à l’étranger. Les recommandations médicales internationales (NIH, 2018) considèrent les DOAC comme le traitement de choix pour les voyageurs, sauf cas particuliers comme les valves cardiaques mécaniques.

Dois-je emporter mon carnet jaune si je suis sous warfarin ?

Oui, absolument. Ce carnet jaune contient vos derniers résultats d’INR, vos doses, et les dates de vos contrôles. Il est reconnu internationalement par les médecins. Ne le laissez pas dans votre valise. Gardez-le dans votre sac à main ou votre poche. Si vous avez une urgence, ce document peut sauver votre vie en permettant au médecin de comprendre rapidement votre traitement.

Puis-je boire de l’alcool pendant mon voyage ?

Modération. Un verre de vin de temps en temps est acceptable, surtout si vous êtes sous DOAC. Mais l’alcool peut affaiblir la coagulation et augmenter le risque de saignement, surtout si vous êtes sous warfarin. Évitez les excès, et ne mélangez jamais l’alcool avec des médicaments pour le sommeil ou la douleur. L’alcool déshydrate aussi - ce qui augmente le risque de caillot.

Quels médicaments dois-je éviter en voyage ?

Évitez les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène ou le diclofénac, car ils augmentent le risque de saignement. Privilégiez le paracétamol pour la douleur. Évitez aussi les compléments alimentaires comme le ginkgo, le gingembre, le curcuma, la vitamine E, ou l’huile de poisson - même s’ils sont naturels. Ils interfèrent avec les anticoagulants. Et ne prenez jamais d’aspirin sans avis médical.

3 Commentaires

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    Lionel Saucier

    novembre 15, 2025 AT 21:38
    J'ai testé le rivaroxaban en Thaïlande, j'ai oublié une dose à Bangkok et j'ai cru que j'allais crever. Le pharmacien m'a dit 'c'est normal' et m'a vendu du paracétamol. J'ai appelé mon médecin en France à 3h du matin, il m'a dit de ne pas paniquer mais de ne surtout pas doubler la dose. Le lendemain j'étais en train de manger des nouilles et je pleurais de soulagement. Les DOAC c'est la vie, le warfarin c'est un cauchemar ambulant.
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    Romain Talvy

    novembre 15, 2025 AT 22:46
    Je suis sous apixaban depuis 3 ans et j'ai voyagé en Inde, au Maroc et au Japon. La clé ? Un organisateur de comprimés avec des cases pour chaque jour + deux alarmes sur mon téléphone. Une à 8h, une à 20h. Même si je suis à Tokyo, je prends à 8h et 20h locales. Mon corps s'ajuste. Mon sang, lui, ne négocie pas. Et j'ai jamais eu un seul souci. C'est juste de la discipline. Pas de magie.
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    Alexis Skinner

    novembre 16, 2025 AT 04:23
    Je viens de rentrer de Bali 🌴 et je peux vous dire que les bas de compression, c'est la révélation. J'avais peur de les porter, j'ai pensé 'je vais avoir l'air d'une grand-mère'... et j'ai eu les jambes les plus légères de ma vie. J'ai marché 12km par jour, j'ai bu de l'eau comme un fou, j'ai évité le thé vert (oui, même à Bali, ils en mettent dans les smoothies 😅). Et j'ai mangé du riz, du poisson, du curcuma... et j'ai survécu. Les DOAC, c'est le Graal. Merci pour l'article, c'est une bénédiction.

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